Côte d’Ivoire :

une prise de distance avec la Cour africaine menaçant la protection des droits humains

 

Abidjan, Paris, le 12 mai 2020 – Le Gouvernement ivoirien a décidé, le 29 avril 2020, de retirer aux individus et aux organisations non gouvernementales le droit de soumettre directement des requêtes auprès de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP). L’ACAT RCI et la FIACAT dénoncent vivement cette décision, en ce qu’elle constitue une menace réelle pour la protection des droits humains en Côte d’Ivoire.

Si la Cour africaine est l’organe judiciaire de l’Union africaine pour la protection et la promotion des droits humains par ses États membres, le droit de recours individuel (tel qu’énoncé par l’article 5.3 du Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples portant création d’une Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples de 1998) est la pierre angulaire du système africain des droits humains. 

Ainsi, la décision prise en Conseil des ministres par le Gouvernement ivoirien de retrait de la déclaration de compétence aura des conséquences néfastes sur les droits des ivoiriennes et des ivoiriens. Ces derniers ne pourront plus saisir directement la Cour africaine pour dénoncer les violations de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples commises par leur pays.

Sans contester la légalité de la présente décision, nos organisations – et bon nombre d’ONG considèrent qu’elle constitue un grave recul en matière de protection des droits humains ; en contradiction avec la candidature de la Côte d’Ivoire à siéger de nouveau au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies (2021-2023). Alors même que la Constitution énonce en son article 26 que « La société civile est une des composantes de l’expression de la démocratie », le Gouvernement n’a pas jugé nécessaire d’associer les organisations de défense des droits humains à cette décision, qui les impacte pourtant directement. 

Considérant que la compétence de la Cour africaine pour recevoir des communications individuelles est fondamentale pour la lutte contre l’impunité, source de nombreux conflits sur le continent africain, l’ACAT RCI et la FIACAT :

  • condamnent fermement la décision du Gouvernement de priver les individus et les ONG de leur droit à un recours auprès de la Cour africaine ;
  • invitent les autorités ivoiriennes à reconsidérer cette décision afin de promouvoir et protéger les droits de leurs citoyens dans le respect de leurs engagements internationaux et régionaux ;
  • rappellent au peuple de Côte d’Ivoire que les droits et la dignité humaine ne sont pas négociables ;
  • se donnent tous les moyens en accord avec la société civile africaine, pour que la saisine directe de ladite Cour par les personnes privées s’impose à tout Etat partie à l’Union africaine à l’exemple du modèle européen.

 

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